Le Livre
Avant d’être le chef-opérateur emblématique de la Nouvelle Vague, Raoul Coutard est photographe durant la guerre d’Indochine. En marge des reportages imposés sur les opérations militaires, il accompagne des ethnologues lors d’expéditions et rend compte de la diversité des peuples du Laos, du Cambodge et du Vietnam. Équipé d’un Leica et d’un Rolleiflex chargés avec des pellicules couleurs – rares au début des années 1950 – il capte la lumière d’un monde qui finit, tout en nourrissant un propos documentaire. Fasciné par la beauté des visages et des paysages, il pose un regard sensuel sur des régions et des peuples mal connus de l’Occident. Entre une exploration à la Joseph Conrad et des scènes dignes d’Apocalypse Now, ces images composent un récit exceptionnel qui n’avait jamais été montré, celui d’hommes et de femmes réunis sous ‘le même soleil d’Asie’.
Les photographies de ce livre sont accompagnées par les commentaires de Raoul Coutard sur ses images quelque soixante ans après les prises de vue.
François Cheval, conservateur du musée Nicéphore Niépce, qui a redécouvert ce travail, analyse la démarche photographique de Raoul Coutard en la replaçant dans son contexte historique.
Les photographies du livre de Raoul Coutard ont été exposées au musée Nicéphore Niépce de Chalon-sur-Saône.
The Same Sun
The famous New wave director of photography, Raoul Coutard learned his art within the French army. On the periphery of the required reports of military operations, he accompanies ethnologists on their expeditions to remote areas. Using hitherto rare colour film, he depicts the ethnic diversity of Cambodia, of Laos, Thailand or Vietnam, countries previously unknown to Westerners.
Les auteurs
François Cheval
François Cheval est né en 1954. Formé à l’histoire et à l’ethnologie, il a été de 1996 à 2017 le conservateur du musée Nicéphore-Niépce à Chalon-sur-Saône, où il a entrepris de débarrasser la photographie de ses présupposés et de présenter l’originalité du « photographique » à travers une muséographie et un discours renouvelés.
Il est à l’origine d’expositions et de rétrospectives remarquées (Charles Fréger, Antoine d’Agata, Stanley Greene, Bruno Boudjelal, Peter Knapp, Saul Leiter, Erwin Blumenfeld, Denis Roche, John Batho, Peter Knapp, Mac Adams, Raoul Coutard…) et défend une jeune photographie exigeante (Elina Brotherus, Raphaël Dallaporta, JH Engström, Claire Chevrier…).
Commissaire de plus de cent expositions, François Cheval s’attache à remettre en cause dans chacune d’elles les certitudes de l’histoire de la photographie, en créant des moments de découverte, de plaisir, d’interrogation et de surprise.
Sollicité pour des projets d’envergure à l’échelle internationale, il est depuis décembre 2017 le directeur, avec Duan Yuting, du musée de Lianzhou, le premier musée de photographie contemporaine en Chine. Il rédige de nombreux textes sur la photographie qui font de lui une référence dans le champ critique. Au Bec en l’air il a contribué aux livres Maalesh, Le Même soleil, The Narrative Void, Ce qu’on n’a pas fini d’aimer, Memory of trees, Monumentalbum, Algérie, clos comme on ferme un livre ? et Le Destin tragique d’Odette Léger et de son mari Robert.
Raoul Coutard
Né à Paris le 16 septembre 1924, Raoul Coutard s’est engagé dans le Corps expéditionnaire français d’Extrême-Orient en 1945. Ému et séduit par l’Indochine où il est envoyé, il y retourne de 1950 à 1954, occupant successivement les fonctions de reporter militaire pour le service cinématographique de l’armée et de directeur de la photographie de la revue Indochine Sud-Est asiatique.
Après avoir fait la photo du premier film de Pierre Schoendoerffer, il est le chef-opérateur du premier long-métrage de Jean-Luc Godard, À bout de souffle [1960]. Avec le succès du film, Raoul Coutard devient rapidement un professionnel très recherché. Sa photographie, subtilement surexposée, renouvelle l’esthétique cinématographique et apparaît comme emblématique de la Nouvelle Vague.
Raoul Coutard a tourné plus de quatre-vingts films et courts-métrages en tant que directeur de la photographie auprès des plus grands cinéastes, parmi lesquels Jean-Luc Godard [dix-sept collaborations], François Truffaut, Jacques Demy, Costa Gavras, Philippe Garrel… Il a lui-même réalisé trois films en tant que metteur en scène, dont Hoa-Binh [1970], pour lequel il a reçu le Prix de la première œuvre au Festival de Cannes. Un César pour la photographie du film Le Crabe-Tambour lui a été décerné en 1978 et, en 1997, l’American Society of Cinematographers l’a honoré à Hollywood pour l’ensemble de sa carrière.
Raoul Coutard est décédé le 8 novembre 2016, près de Biarritz où il vivait ces dernières années.